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25/11/2012

Le casse-tête catalan

 

Le casse-tête catalan

 

La Catalogne vote pour renouveler le parlement catalan, dans une situation où tous les dés sont pipés. Le président ultra-libéral de la Generalitat, Arturo Mas (de CiU: Convergence et Union) se rêve en fondateur d'un Etat catalan. Sa fuite en avant "souverainiste" cache mal l'ampleur des amputations sociales, salariales, qu'il a opérées, la mutilation sans précédent de "l'Etat de bien-être social", la mise à mal violente des services publics, la pauvreté qui s'installe alors que les profits  flambent... Arturo Mas, c'est du Thatcher plus "l'indépendance".
Une partie de la bourgeoisie catalane a trouvé dans la relance de "l'indépendantisme" un exutoire, une diversion, à la crise, à sa crise. Ce n'est pas nouveau...S'il gagne, Mas a proposé un référendum sur l'indépendance. Une majorité de Catalans paraît acquise au principe d'un Etat catalan.
Le plus  significatif,  c'est la poussée "souverainiste", "indépendantiste", dans les classes populaires et moyennes, qui payent durement "la crise" et ressentent les relations conflictuelles avec Madrid comme un assujettissement, une discrimination. En effet, les gouvernements socialistes et "pépistes", attachés au sacro-saint "pacte de la transition", à une Constitution de 1978 obsolète, à une vision par trop "centraliste", ont été incapables d'anticiper, d'avancer un "projet national catalan" dans le cadre d'une Espagne républicaine, fédérale, plurinationale.
 La manifestation du 11 septembre 2012 fut colossale, et la revendication: "Catalogne: un nouvel Etat européen", massivement majoritaire.
Le sentiment "indépendantiste" charrie de tout; il porte en lui des aspirations légitimes, le droit à l'auto-détermination, mais aussi le danger d'atomisation, de balkanisation (une aubaine pour les marchés et l'Europe libérale), et un "nationalisme" exacerbé qui suscite un certain mépris des régions "pauvres" de l'Espagne. Au nom de la "péréquation nationale", la bourgeoisie catalane, mais aussi beaucoup de simples citoyens, ne veulent plus "payer pour les fainéants": les Andalous, les Extrémègnes.... Tout ceci prouve à quel point l'intouchable "pacte monarchique de la transition"(dont le "pacte fiscal"), verrouillant consensuellement le système issu du franquisme recyclé, est caduc depuis longtemps, et en rien "modélique". Le système "démocratique" espagnol vit une vertigineuse "crise de légitimité", instrumentalisée de tous bords. Le capital a mis ses œufs dans plusieurs paniers pour préserver sa domination. Cela brouille les lignes d'affrontement.
Cette crise sociale, politique, institutionnelle, provoque une forte aversion contre "les politiciens" et un aiguisement de la lutte des classes. Souvent, même confusément, la "revendication nationale" va de pair avec l'aspiration à la transformation sociale. La récente grève générale a été en Catalogne plus suivie que dans d'autres régions. Les mouvements sociaux contre "l'establishment" madrilène, contre ceux qui "ne nous représentent pas", contre les terribles saignées ("recortes"), de Rajoy et de Mas, sont vigoureux. Leur articulation avec les syndicats et la gauche catalane (mais qu'en reste-t-il?) s'avère faible... La lutte pour une Espagne plurinationale ne peut en réalité être séparée du combat contre les droites catalanes et espagnoles, qui font la même politique néfaste, tout en arborant les bannières "patriotiques". Voilà ce que les uns et les autres s'efforcent de dissimuler.
L'ERC, la "Gauche républicaine catalane", un parti créé en 1931 pour exiger l'avènement d'un Etat catalan républicain (cet Etat fut proclamé, avec la République, le 14 avril 1931), a une politique à géométrie variable. Le parti socialiste catalan a géré la Catalogne pendant deux mandatures, sans vision, sans véritable projet, rallié au néo-libéralisme. Il le paie électoralement. La "gauche de gauche": communistes, verts, groupes anticapitalistes, alternatifs, républicains... a été affaiblie par le bipartisme, mais aussi par ses divisions, son déphasage... Elle pèse peu.

 

Le problème catalan reste donc un défi urgent pour la gauche espagnole et catalane. Seule une réponse sous forme de projet républicain, social, anticapitaliste, fédéral, pleinement participatif, plurinational, débarrassé d'une monarchie illégitime, peut encore modifier la donne et éviter l'éclatement.

 Jean Ortiz

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