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09/11/2013

La montée vers la lumière

 

La montée vers la lumière

 

Vendredi soir. Montée vers la lumière à l'appel du Sauveur. Conférence à Luz-Saint-Sauveur sur Marinaleda. Mes camarades devraient se demander pourquoi l'expérience de Marinaleda, ce village andalou d'utopie en actes, intéresse tellement la gauche de gauche. Beaucoup plus que le spectacle affligeant des municipales et le festival des "embrassades feintes" que dénonçait jadis Jean-Luc Mélenchon.

En route vers les sommets. Et un temps à ne pas mettre une vieille Dacia dehors. Des gaves qui grondent. Pour accéder au "pays Toy", il faut traverser les lugubres gorges du Luz. Puis on débouche sur la lumière. Cette lumière qui fascina le père Hugo; il y séjourna en 1843. Plus loin, c'est la mythique montée des pédaleurs anabolisés vers Hautacam. Un pays jadis de contrebandiers.

Luz, au cœur de la vallée d'un gave que l'on peut appeler de Gavarnie ou de Pau, selon le patriotisme de clocher de chacun. Dans ce village de moins 1 200 habitants, se love un temple de la culture; une architecture alliant les voûtes anciennes aux structures vitrées modernes : la Maison de la montagne. Autour d'un tronc s'enroulent les lianes, et une Eliane qui est tellement identifiée à ce lieu, à une équipe d'utopistes, qu'elle a décidé d'y demeurer toujours, même empaillée, aux côtés des aigles, des marmottes et des genettes.

 

Dans la salle, plus d'une quarantaine de personnes, de tous âges, à majorité jeune, écoute religieusement. Nous sommes à Luz-Saint-Sauveur. Il y a là des cocos, des "alternatifs", des verts, des anars, des "contre le gaz de chiste", des "rabistes", des filles de Républicains espagnols, tous en colère et en recherche d'alternatives de rupture avec le capitalisme destructeur. On y parle "productivisme", "consumérisme", "décroissance", "écosocialisme", "buen vivir" ... On souhaite que les élus locaux "de gauche" ne soient pas de simples et honnêtes gestionnaires, mais qu'ils jouent aussi le rôle d'un Gordillo, d'un Cañamero Valle à Marinaleda. Qu'ils soient un outil politique pour affronter les choix capitalistes européens, pour mettre en place à l'échelle locale des dynamiques de démarchandisation, des logiques post-néo-libérales. Qu'ils utilisent leur pouvoir comme un contre-pouvoir pour subvertir au quotidien, par leurs actes concrets, le système capitaliste.

Pendant ce temps, une inquiétante campagne se développe visant à déstabiliser Pierre Laurent et à le faire passer pour un adepte de la vieille ligne "union de la gauche". Derrière cette opération, il y a des calculs des uns et des autres, que je devine et qui m'insupportent. Che Guevara disait qu'il n'y a pas de véritable politique qui ne soit éthique. Nous ne parviendrons pas à aller vers un monde vraiment nouveau sur une base de "realpolitik" de manœuvres tactiques, politiciennes. Dès le départ, la création du Front de Gauche m'a enthousiasmé. J'avais même proposé la création de comités locaux souples, informels, largement ouverts... Je sais ce qu'il m'en coûta. Que l'on ne compte pas sur moi aujourd'hui pour avoir la mémoire courte.

 

Après le forum, le repas sur place réunit un rêveur impénitent, un jeune libertaire, une mère de famille, un coco électron libre, une Eliane qui y croit encore dur comme fer, et un espion au bouc sibyllin. Une ambiance à la déraison raisonnable; là-haut, les sommets se drapent d'un brouillard complice.

 

Jean Ortiz

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