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15/03/2014

Une marche géante va "prendre Madrid" le 22 mars

Une marche géante va "prendre Madrid" le 22 mars

 

 Depuis des mois  se prépare dans toute l'Espagne la "Marche de la dignité". En colonnes venues de toutes les latitudes de la Péninsule, le 22 mars, elle, elles, vont "envahir" Madrid. Sur toutes les routes, des marcheurs sont déjà à l'effort depuis des jours, vers la capitale. En ruisseaux humains qui vont devenir des flots, des vagues, à l'approche du 22 mars... Et c'est dur. Cela nécessite une logistique solidaire lourde. Des milliers d'autres viendront en bus. Une multitude de chômeurs (six millions en Espagne), de "sans terre" (alors que de grands "cortijos" de 30.000 hectares monopolisent la terre en Andalousie), de précaires, de victimes des expulsions  locatives, comptent camper à Madrid et y rester.
Il peut y avoir un avant et un après le 22 mars.  Plus d'un million de "marcheurs" sont attendus. Au départ, l'idée a été lancée par le Syndicat andalou des travailleurs, de Diego Cañamero, le "Front civique-Nous sommes la majorité" de l'ex secrétaire général du PCE Julio Anguita et les "Campements dignité d'Extrémadure".

Le manifeste et les revendications "aglutinantes" ont permis que nationalement les marches soient soutenues par Izquierda Unida, la CGT, la CNT-AIT, de nombreux collectifs de lutte, et localement par une constellation d' "assemblées populaires", une multitude de mouvements sociaux, les "marées" vertes des enseignants, blanches des personnels de la santé, contre les privatisations, rouges des travailleurs licenciés de la multinationale Coca Cola, des comités larges regroupant les différentes colères, le PCE, les "plateformes" contre les dizaines de milliers d'expulsions consécutives à l'explosion de la "bulle spéculative immobilière" (86.000 familles andalouses ont ainsi été expulsées de leurs maisons et appartements par les banques), Attac, les collectifs 15M ou issus du 15 M, la Gauche anticapitaliste, les associations de quartier, de voisins, les organisations  citoyennes...
Les deux grands syndicats UGT et CCOO se sont jusqu'à présent tenus à l'écart du mouvement, nationalement, mais l'unité syndicale s'est matérialisée au Pays basque, en Galice, à Valencia, à Murcie, en Andalousie... et l'ensemble des syndicats de salariés de ces régions convergent déjà ensemble vers Madrid.

Pour les colonnes de "marcheurs", il s'agit d'engager un bras de fer frontal, dans la durée, avec le gouvernement et les différents pouvoirs qui se sont succédés, "au service du capitalisme et de la Troïka". Cette journée de rébellion démocratique, de "désobéissance", pacifiques,  devrait constituer la plus grande levée populaire de l'après franquisme, et pourrait marquer la naissance, selon ses organisateurs, "d'un mouvement nouveau", d'une "unité sociale en marche", d'un "15M ouvrier"... "Nous ne voulons que, comme d'habitude, nos actions restent sans lendemain", a déclaré Julio Anguita.

Joint par "Humanité.fr", Diego Cañamero Valle se félicite de ce qui "enfin bouge", des efforts unitaires pour entraîner "la gauche qui traîne les pieds". Diego, sous la menace d'une peine de prison pour "occupation illégale de terres", nous répond avec passion, comme il galvanise les siens,  et tous les autres "qu'il faut gagner"

"Qu'ils s'en aillent ces gouvernements-parasites, ces dirigeants corrompus, qu'ils soient jugés et emprisonnés, tout comme les banquiers sangsues et ripoux" ajoute Diego. "Ils ne nous représentent pas, cette caste d'intouchables. Ils considèrent normal de "robar" (voler). Les Espagnols n'ont pas voté pour cela"(...) "L'économie ne leur appartient pas. La démocratie, lorsque les gens ont faim, n'est qu'un simulacre (...) "Le silence du peuple me fait peur... Il est temps de se réveiller, de se mettre à marcher, de "prendre" les rues, les places... La dignité avant tout; elle est inaliénable. Répandons la dignité (...) Ils peuvent tout nous prendre mais pas la dignité".
Le manifeste de la Marche appelle à construire "le pouvoir du peuple".

Les revendications se veulent fédératrices:

non au paiement de la dette (l'Espagne rembourse quotidiennement 105 millions d'euros au titre de paiement des intérêts de la dette)

non aux "recortes" (amputations) sociaux et publics

un emploi digne et un toit pour tous

pour un revenu " de base", qui permette de vivre

 

Depuis des mois, l'Espagne populaire résiste, manifeste, crie, souffre... Si les milliers de petits ruisseaux commencent enfin à converger et à s'unir, un avenir nouveau peut poindre le 22 mars.

Jean Ortiz

Ortiz vendu au Figaro!

 

 

http://blog.lefigaro.fr/amerique-latine/2014/03/venezuela-un-an-apres-la-mort-de-chavez-maduro-veut-approfondir-la-revolution.html

09/03/2014

Venezuela : lettre ouverte à Olivier Compagnon

Maître de Conférences à l'Institut parisien des Hautes Etudes d'Amérique latine, vous êtes un latino-américaniste  reconnu, de premier plan, et je vous lis toujours avec intérêt.
Mais je ne peux accepter ce que vous déclarez dans "L'Humanité" du 9 mars 2014 à propos du Venezuela: "la violence politique et les manipulations médiatiques sont aujourd'hui l'apanage des deux camps, au point que le climat actuel s'apparente, plus encore qu'en 2002, à celui d'une guerre civile".
Cela revient, dans les faits, à renvoyer dos-à-dos les agresseurs et les agressés. Cela revient à nier la légitimité démocratique du gouvernement Maduro, et à légitimer, par contre, la violence d'une partie de l'opposition, celle qui veut en découdre par tous les moyens (la stratégie "du chaos", du "coup d'Etat rampant, permanent"), sans attendre les prochaines échéances électorales.

Ces théories de "l'équidistance" entre victimes et semeurs de troubles , du "juste milieu", des "deux violences", font partie, vous le savez, de la panoplie classique de  guerre idéologique de Washington, de la plupart des télés, journaux  et agences de presse occidentales, du "latifundium médiatique" néosociolibéral. Il s'agit de discréditer et d' isoler tout mouvement de libération anti-impérialiste, tout processus (vrai) de transformation sociale et de souveraineté nationale.

Ces théories, fort usées, servent également d'alibi au révisionnisme historique, à ceux qui, par exemple, à propos de la Guerre d'Espagne, "equiparan" (mettent sur un même plan) la "violence franquiste" et la "violence républicaine"... par ailleurs ni de même nature ni de même grandeur.

Il peut y avoir  au Venezuela, ça et là, des réactions d'auto-défense populaire contre "les violents", des faits isolés de provocateurs échappant aux autorités , mais ils restent marginaux, non stimulés et planifiés "d'en haut". Parler de climat de "guerre civile", comme vous le faites, est outrancier; cela participe à l'opération "climat de chaos", que l'opposition la plus conservatrice veut ancrer, accréditer, et pousser à l'extrême, afin d'en tirer les bénéfices, fussent-ils sanglants.

 

Nicolas Maduro est un président légitime, élu en avril 2013 par 50,66% des voix. C'est une victoire étriquée, j'en conviens, mais victoire quand même, reconnue par toute la communauté internationale, bien que niée par le candidat de l'opposition, Henrique Capriles. Celui-ci appela à la "désobéissance civile"; dans les faits, à la violence: 11 morts,  chavistes. Que se serait-il passé si les autorités légales avaient perdu leur sang froid? Et si elles le perdaient aujourd'hui alors que des groupes de choc détruisent des édifices sociaux, administratifs, des centres de santé, des coopératives, incendient des stations de métro, des centaines de voitures, des équipements publics, et qui, masqués, tirent parfois à balles réelles? Avec en sous main le soutien des Etats-Unis.

Ces "démocrates " escomptaient gagner les élections municipales de décembre 2013. Patatras! Nouvelle déconvenue électorale. Les leaders de droite la plus "ultra", Mme Maria Corinna Machado et M. Leopoldo Lopez, ont lancé "l'opération salida" ( "opération départ du président Maduro"), le 6 février au Tachira et le 12 à Caracas, pour chasser le président légitime, par la tension permanente, la violence de rue, le simulacre de chaos, la déstabilisation économique. "Opération salida": les mots sont les mots.

Sortir de la Constitution: n'est-ce pas une forme de violence? Appeler au soulèvement contre un prétendu "régime autoritaire", démocratiquement élu:  n'est-ce pas une forme de violence? L'opération est si flagrante, si dangereuse, que même l'OEA, le 7 mars 2014, a adopté une résolution (par 29 voix contre 3) ,condamnant l'entreprise de déstabilisation en cours au Venezuela. Du quasiment jamais vu! 29 pays du continent soutiennent Caracas et la mise en place, par le gouvernement chaviste, de "Conférence(s) de paix", nationale et régionales, ouvertes au patronat, à l'opposition...

Comment parler de "manipulation médiatique" alors que le gouvernement multiplie les initiatives de pacification? N'est-ce pas tomber dans le déni de démocratie, et cautionner, même si l'on s'en défend, les boutefeux? N'est-ce pas rendre un mauvais service à la légalité démocratique, à l'Etat de droit? Et au-delà, à notre engagement en faveur de la libération des peuples.


Jean Ortiz

Maître de Conférences (Pau)