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25/06/2012

Lettre ouverte à François Hollande

Lettre ouverte à François Hollande

Monsieur le Président

Pour tout vous dire, j'ai voté pour vous, ou plutôt contre N. Sarkozy, au deuxième tour s'entend, en me demandant si vous alliez tarder 15 jours ou un mois avant de nous imposer "la rigueur de gauche". Votre coup de pouce au SMIC relève du coup d'auriculaire. Vos conseillers en communication ont dû vous suggérer de maigrir davantage. C'est bon pour votre santé, mais par pour le pouvoir d'achat de millions de travailleurs.
Votre coup de pouce équivaudrait en réalité à un gain de 6,6 euros par mois (en plus de l'inflation). De quoi s'acheter un flacon de vaseline pour faire passer votre "rigueur de gauche".
Je sais... Je sais... La "rigueur de gauche" est humaniste, équitable, justement partagée, presque indolore, familiale, et surtout "de gauche", alors que la "rigueur de droite" n'est que de droite, et donc: brutale. Pour ceux, ceux d'en bas, qui vont en faire les frais, le résultat est cependant le même; mais à se faire entuber, il vaut mieux que se soit par "les nôtres"...
Cher Monsieur le Président
Ce qu'il y a de bon, de prévisible, avec les sociaux-libéraux, c'est qu'ils ne vous déçoivent jamais. On sait qu'ils ne s'attaqueront ni aux puissances financières, ni aux "marchés" prédateurs, ni au "mur de l'argent", ni aux grands patrons. "On ne peut pas les faire fuir!!! Ce sont eux qui créent les richesses, l'emploi". Soyons donc réalistes, pragmatiques, ne demandons que ce qui est possible... Laissons l'utopie à "l'extrême gauche" irresponsable, surenchériste, communiste, mélenchonniste, utopiste...
Cher Monsieur le Président
Des millions d'électeurs de gauche attendaient autre chose et vont rapidement avoir la gueule de bois ( pas celle d'un ex bon vivant au lendemain d'une grande bouffe corrézienne). Souvenez vous, c'était hier:  Qui a assuré la victoire de la gauche? Qui descendra dans la rue demain? Qu'en est-il de "la croissance par la feuille de paye"? Je ne regrette pas, monsieur le Président  d'avoir contribué à battre, par mon  vote, votre prédécesseur. J'aurais aimé aussi, du même coup, virer par la porte la politique économique "libérale"... Mais le temps des promesses est terminé... vous la faites rentrer par la fenêtre,  alors qu'elle n'était même pas sortie.

Jean Ortiz
Maître de conférences à l'Université de Pau

Sujet du Bac ou propagande?

SUJET DE BAC OU PROPAGANDE ?

 Le sujet d'espagnol Langue Vivante 1 pour les candidats au Baccalauréat
des sections S et ES, 2012, relève de la basse propagande et non de la pensée
 critique, du questionnement et de l'analyse ouvertes, nécessaires...
 Les impétrants doivent étudier un torchon tellement anti-cubain
 qu'il en est ridicule pour qui connaît, mais qui bourrera le crâne, lobotomisera
 ceux qui doivent prétendument y "réfléchir"... Peut-on réfléchir sur un tract
 du Front National? Les réalités cubaines sont si complexes, si évolutives,
qu'elles peuvent et doivent se prêter à approches plurielles, à confrontations
 fondées,  contextualisées... Bienvenus le doute, la critique,
la démarche rigoureuse,  sourcée, bienvenue l'approche scientifique,
en empathie ou hostile...
Mais pas le torchon. Les candidats auraient pu réfléchir
 sur des auteurs cubains critiques ou "révolutionnaires", talentueux,
dont il restera la qualité de l'écriture et souvent du questionnement:
Reynaldo Arenas, par exemple, violent, mais grand écrivain,
 pamphlétaire , mais "con arte",
sans parler du foisonnement passé et actuel de romanciers et poètes cubains
de qualité: les maîtres: Alejo Carpentier, Nicolas Guillen, Cabrera Infante,
Lezama Lima...
 et les générations d'aujourd'hui: Miguel Barnet, Leonardo Padura ,
qui mériterait d'être "nobélisable" un jour,
Anton Arrufat, Nancy Morejon, Abilio Estévez, Ena Lucia Portela,
Reinaldo Montero, Julio Travieso, Alexis Diaz Pimienta...
Aucun n'avait ni n'a le doigt sur la coûture du pantalon... Mais aller chercher
un médiocre auteur espagnol, en visite touristique dans l'enfer dictatorial
cubain,  où "Le muchacho de Camagüey" (titre du texte), crèverait
de faim et terminerait  en prison, cela relève de la crapulerie intellectuelle,
de la guerre idéologique,  du cliché politicien usé, de la pensée unique...
Cuba n'est ni le "paradis socialiste",  ni le "goulag tropical". Mais son peuple,
 sa révolution, ses acquis, ses erreurs,
 ses manques, et son histoire le luttes pour l'indépendance, la dignité,
la souveraineté, la justice sociale, méritent une vraie réflexion,
pas du vomi, sassé et ressassé par les plupart des médias-mensonges
 et malheureusement la plupart des intellectuels et enseignants français,
 "aux ordres", parfois même sans s'en rendre compte. Ce n'est pas à Cuba mais
 en France qu'un peuple a rejeté par référendum un traité constitutionnel
 qu'on lui a finalement imposé. Ce n'est pas à Cuba que la liberté médiatique
 relève  de marchands d'armes, de canons, d'avions de combat,
de milliardaires du bâtiment et des travaux publics...
Ce n'est pas à Cuba que l'on chasse le Gitan, le sans-papiers, l'immigré,
 que l'on brime le syndicaliste, l'universitaire trop critique... C'est l'Espagne
 de l'auteur du torchon, Luisgé Martin, qui possède le seul parc
 thématique fasciste  au monde: le Valle de los Caidos, où est enterré
 le dictateur Franco  (domaine et mausolée franquistes entretenus
 aux frais des contribuables).
L'auteur, ou les auteurs du choix de ce sujet poubelle, devraient avoir
le courage  de nous expliquer ce qui a motivé un choix
si caricatural, mensonger, dénigrant,
si peu conforme à la réalité cubaine,
 si contraire à notre esprit de la Renaissance,
des Lumières, des philosophes, de la Révolution française...,
de notre "école laïque et républicaine".
Oui au pluralisme, à l'approche critique, plurielle... non à l'embrigadement ,
 à la propagande "libérale" au sein du service public d'Education Nationale.

Jean Ortiz Universitaire Cubaniste

24/06/2012

Un Temps ibérique très fou, à Talence

Un temps ibérique, très fou, à Talence.

 

Les 22 et 23 juin 2012, la mairie de Talence, et de nombreux partenaires, notamment l'association mémorielle ¡Ay Carmela!, le Comité des jumelages avec la ville madrilène d'Alcalá de Henares, le Service culturel de la ville, etc, etc. ont voulu faire revivre l'histoire, la mémoire, trop souvent reléguées, des Républicains espagnols, à travers deux jours d'émotions, d'humanisme, de débats, de concerts et de réflexions sur les grands enjeux contemporains... Deux films (Ortiz-Gautier) furent projetés, pour servir de base à des débats chauds et profonds, à l'Auditorium du Forum: Le cri du silence, sur les fosses communes du franquisme, et La traversée solidaire, sur l'odysée du Winnipeg, un bateau-solidarité qui, de Pauillac, prit à son bord, à l'été 1939, plus de 2 000 Républicains espagnols réfugiés en France, vers le Chili de Front Populaire. A Valparaiso. Le maître d'œuvre en fut un poète "d'utilité publique", le chilien Pablo Neruda, qui conçut cette opération comme un poème d'amour au pouvoir subversif, comme une utopie concrète.

Durant chaque projection et chaque débat, M. le maire (Modem) a appuyé cette manifestation de sa présence, nullement par protocole. Pour lui: "la ligne de démarcation passe entre les humanistes et les autres".

Le samedi, comme le vendredi, concerts et débats se déroulèrent dans la salle de l'Auditorium du Forum et en "forum plein air-faux-rond", combles. Faut croire que les "Rouges" font recette; la preuve, la "Roja" l'emporta deux à zéro sur une médiocre équipe de France. Deux concerts clôturèrent ce "Temps ibérique 2012", un grand cru transfrontalier, "con denominación de origen" (d'appellation contrôlée), et incontrôlable. Comme le groupe flamenco Amarga Menta, aux échos de Ketama... Faut-il que le flamenco soit vivant pour qu'il puisse être ainsi fusionné, métissé, secoué, tout en restant fidèle à "las esencias"!.

Le groupe "Comunero" enthousiasma toutes les générations. "Comunero", c'est le nom donné au grand-père de Thomas Gimenez, par ses camarades de la colonne anarchiste. Ce surnom, Thomas l'assume, le prolonge et le revendique avec fierté. Il a créé un groupe qui (ré)interprète, dans les sonorités, les tempos, les rythmes actuels, le répertoire républicain espagnol. Ces chansons de lutte sont le plus souvent calquées sur d'anciennes mélodies populaires, du XIXe et du début du XXe siècle.

"Comunero" "rockise" ce répertoire emblématique, symbolique, voire mythique, sans le trahir, ni le frelater; il reste fidèle aux fondamentaux, au contenu historique, et les projette dans l'univers et les luttes d'aujourd'hui. Le résultat, tonique, qui féconde et fertilise, fédère, est d'une qualité qui mûrit à chaque concert. Celui de Talence était illustré par le dessinateur bordelais Bruno Loth. "¡Chapó!". Les musiciens qui accompagnent Thomas, sont des anciens de "Noir Désir", "L'Air de rien", "Les Hurlements d' Léo", "La Varda", etc. Chacun apporte sa couleur, son cachet, à la clarinette, au violon, à la contrebasse, au "cajón", à l'accordéon... Ces artistes ne sont pas là au seul service du chanteur, mais fusionnent dans une création pêchue, étonnante d'actualité, et en devenir.

Corps frêle et pantalon vert, le troubadour Nilda Fernández, au final, alluma les étoiles. J'avais été naguère intrigué par "Madrid, Madrid", puis j'avais perdu toute trace... J'ai pris une claque. Un concert met à nu, "met à morphose" un chanteur, accompagné de sa seule guitare, de sa solitude, de ses blessures, de ses rêves brisés mais ô combien vivants, les siens, les nôtres... Le public, nombreux et réceptif, captif, entra dans l'univers étrange, onirique, de ce poète chanteur, d'une surprenante présence sur scène. Nilda a une voix de cristal, androgyne, envoûtante, mi-plainte, mi-colère, chamanique, fragile, mais incassable, inclassable. Les messages sont à débusquer sous les images faussement anodines de ses textes. De l'Espagnol, il n'a aucun des clichés. Il se revendique gitan, lorquien, indien, argentin, catalan, galicien, russe, de partout, de par tous, de par lui et nous, et les autres... Les autres. Les racines nildiennes sont aériennes. Les chansons de Nilda tournent et retournent sur elles-mêmes, pour reprendre sans cesse leur envol. J'ai, nous, avons volé avec lui. "Muy alto".

A Talence, le "Temps ibérique 2012" fut fou, fou, fou, et "uto piques", "uto lances". A Talence."Garde tes songes, les sages n'en ont pas d'aussi beaux que les fous" (Baudelaire). Il reste heureusement encore des "locos", des sages fous, qui "boulèguent" un monde à changer, des aurores à accomplir."¡Ay Carmela !"

 

Jean Ortiz